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Ce qui est sûr, c’est que l’idée d’un pèlerinage ne m’avait pas effleuré l’esprit, mais c’est dans la tête de mon mari que ce projet a commencé à germer, le jour de son départ en retraite. Gérard est de confession catholique et moi protestante, et cela me paraissait un peu cérémonieux, alambiqué, un peu guindé, mais le ver était dans le fruit et j’ai commencé à lire des ouvrages, bref à me documenter, car l’idée germait ferme. Le huit avril 2015, nous avons fermé la maison et avons franchi le seuil pour vivre cette grande aventure de trois mois de marche, de découvertes. Nous avons eu la chance de débuter ce chemin au printemps, symbole de renaissance et de renouveau, moment privilégié où la nature s’éveille. Nous avons traversé tant de contrées, de paysages, admiré tant de sites que nous nous en sommes nourris. Et que dire de toutes ces rencontres, tous ces pèlerins tendus vers un seul et même but portant en eux tant de volonté, de souffrances, d’espoir, marchant pour des proches malades ou handicapés. Nous en avons croisé beaucoup lors de petits arrêts dans la fraîcheur des églises où la lumière est si douce, où l’on peut se reposer quelques minutes, se ressourcer, laisser quelques prières pour accompagner tous ceux que l’on aime et illuminer l’avenir. Ce qui nous aura le plus marqué au long de ce Camino, c’est cette liberté d’aller devant nous, dans des paysages superbes, et surtout la rencontre de l’autre où les différences sociales sont abolies, où le tutoiement est de rigueur tout naturellement et le bonheur non feint de se retrouver au détour du chemin, quelle joie d’avoir ouvert les yeux sur tant d’humanité. Ce chemin est aussi une façon de se tester et de se rendre compte que nous avons besoin de si peu pour vivre et être heureux, de se rendre compte également que par la force de la volonté, on peut transcender la douleur et continuer à avancer, le corps humain est vraiment une machine merveilleuse. Sur ce chemin on redevient un peu l’enfant enfuit avec ses besoins primaires : boire, manger, dormir et dans l’attente de ce que demain va nous offrir, les émotions, les joies l’emportent toujours sur le négatif, c’est l’essence du chemin. Lorsque que l’on aperçoit au loin une des flèches de la cathédrale Saint Jacques, une vague vous envahit, on essaie de contenir l’émotion, c’est alors que la digue cède et que le moment tant attendu est savouré, les larmes coulent, on voudrait retenir le temps longtemps.
Merci la vie de nous avoir permis de vivre cette expérience incroyable et merveilleuse qui marque une vie à tout jamais ...


Annie Carisey



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